ARTICLE 19 appelle les dirigeants mondiaux à inviter l’Érythrée à prendre des engagements forts en matière de droits humains, y compris en garantissant la liberté des médias et en levant les restrictions draconiennes qui pèsent sur la liberté d’expression et répriment toute dissension dans ce pays. Cette requête survient alors que cet État se soumet à son deuxième Examen périodique universel (EPU) devant les Nations unies à Genève. Ce processus permet d’évaluer par roulement la situation des droits humains dans tous les États membres des Nations unies.
« L’Érythrée a disparu de l’ordre du jour du monde. Pendant trop longtemps, la communauté internationale a gardé le silence tandis qu’un régime répressif gouvernait d’une main de fer, a déclaré Henry Maina, directeur d’ARTICLE 19 Afrique de l’Est.
« Il faut lutter contre les violations systématiques des droits humains dans le pays. Les membres africains du Conseil des droits de l’Homme doivent inciter les autres États à faire le nécessaire pour obtenir de l’Érythrée qu’elle s’engage de façon concrète à améliorer sa situation déplorable en matière de droits humains, y compris le droit à la liberté d’expression, qui est essentiel. Là où la censure règne, les gens ne peuvent pas défendre les autres libertés fondamentales », a ajouté Henry Maina.
En 2001, tous les journaux indépendants érythréens ont dû fermer leurs locaux, et au moins 18 journalistes et 11 anciens représentants gouvernementaux ont été incarcérés sans inculpation ni jugement. Parmi eux, huit sont morts en détention. Plusieurs stations de radio et chaînes télévisées ont dû cesser toute diffusion et leurs employés ont été emprisonnés. On ignore où se trouvent bon nombre des personnes en détention. Les médias qui continuent leurs activités dans le pays appartiennent à l’État et servent de tribune au ministère de l’Information.
ARTICLE 19 exhorte le gouvernement érythréen à saisir l’occasion de l’EPU pour promettre d’améliorer la liberté d’expression sur son territoire, notamment :
- en s’engageant à relâcher sans condition tous les journalistes encore emprisonnés et en leur offrant des réparations adaptées pour leur détention arbitraire ;
- en révélant le nom de tous les détenus, l’endroit où ils se trouvent et leur état de santé, et en confirmant les éventuels décès en détention ;
- en diligentant sans délai des investigations efficaces sur les décès survenus ;
- en prenant au plus vite des mesures efficaces pour traduire les responsables présumés de violences à l’encontre de journalistes et de défenseurs des droits humains.
« Depuis plus de 10 ans, les autorités ont le contrôle absolu des médias et font tout ce qu’elles peuvent pour empêcher la progression d’Internet. La population érythréenne est nourrie de force à la propagande de l’État et n’a pas accès aux informations et aux idées provenant de l’étranger », a expliqué Henry Maina.
Lorsque l’Érythrée s’est soumise à son dernier EPU en date il y a quatre ans, le gouvernement ne s’est pas engagé à libérer les journalistes emprisonnés et n’a répondu à aucune question au sujet du sort des journalistes et des défenseurs des droits humains en détention. Les autorités érythréennes ont déclaré qu’elles envisageraient d’autoriser des spécialistes des Nations unies à se rendre dans le pays, mais Sheila Keetharuth, la Rapporteuse spéciale des Nations unies sur la situation des droits humains en Érythrée, et Frank La Rue, le Rapporteur spécial des Nations unies sur la liberté d’expression, n’ont jamais pu entrer sur le territoire.
Dans sa contribution à cet Examen, ARTICLE 19 a noté que les persécutions et l’emprisonnement de journalistes et de défenseurs des droits humains perduraient en toute impunité. Elle a également indiqué que les médias étrangers n’avaient pas le droit de réaliser des reportages sur place et que toutes les transmissions extérieures étaient bloquées.