ARTICLE 19 condamne avec la plus grande fermeté le meurtre des manifestants ainsi que la culture d’impunité qui persiste en Guinée. Les événements tragiques survenus lors d’une manifestation à Conakry le 10 mai, ayant entraîné la perte de sept (7) vies humaines et de nombreux blessés, constituent une grave violation des droits fondamentaux de l’homme. Nous appelons les autorités à ouvrir immédiatement à une enquête indépendante, impartiale et transparente afin de faire la lumière sur ces incidents.
Il est essentiel d’identifier les responsables de ces actes de violence et de les obliger à rendre compte de leurs actes, afin que la justice soit rendue. Le gouvernement guinéen a l’obligation de garantir la protection et le respect des droits de l’homme de tous les individus, conformément aux normes internationales et aux engagements régionaux énoncés ci-dessous.
Les Forces vives de Guinée, qui rassemblent des partis politiques, des syndicats et des organisations de la société civile de l’opposition; ont exprimé lors de leur appel à manifester un certain nombre de revendications importantes. Celles-ci comprennent la libération des prisonniers politiques et l’ouverture d’un dialogue conformément aux conditions approuvées par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Malheureusement, les manifestations qui ont débuté le soir du 9 mai ont rapidement dégénéré en actes de violence dans plusieurs quartiers, causant ainsi de nombreuses victimes. Dans un communiqué publié le 10 mai, les Forces vives de Guinée ont rapporté un bilan préoccupant de ces troubles. Au moins sept (7) personnes ont perdu la vie et trente-deux (32) autres ont été blessées à la suite des tirs. De plus, plus de cinquante-six (56) personnes ont été arrêtées lors de ces événements.
Les autorités ont rejeté ces chiffres en les qualifiant de faux et purement imaginaires. Cependant, les témoignages de la mère d’une des victimes soulignent de manière accablante l’usage inutile et excessif de la force meurtrière par les forces de sécurité.
Alfred Bulakali, Directeur Régional d’ARTICLE 19 Sénégal-Afrique de l’Ouest, a déclaré ‘nous sommes profondément préoccupés face aux rapports faisant état de violences et de pertes de vies lors des récentes manifestations à Conakry’. Il a souligné que ‘le droit à la liberté d’expression et à la liberté de réunion est un droit fondamental de l’homme, et qu’il incombe au gouvernement guinéen de protéger et de respecter ces droits pour tous les citoyens’. Il a insisté sur l’importance pour les autorités de mener une enquête indépendante et impartiale sur ces événements tragiques, afin d’identifier les responsables et de veiller à ce que justice soit rendue. ‘Nous exhortons le gouvernement guinéen à favoriser le dialogue et la résolution pacifique des griefs, ainsi qu’à mettre en place des mécanismes permettant aux citoyens d’exprimer leurs préoccupations et leurs revendications légitimes sans craindre de représailles.’
‘Le schéma récurrent de répressions sanglantes lors des manifestations en Guinée nécessite une approche globale et à long terme. Cela comprend la nécessité d’assurer la justice en tenant les auteurs de violations des droits de l’homme responsables de leurs actes, de réformer le cadre politique pour garantir le respect du droit à la liberté de réunion pacifique, de former et d’éduquer les forces de sécurité sur les droits de l’homme et la gestion non violente des foules, d’engager un dialogue avec les organisations de la société civile et les organisateurs de manifestations, et de renforcer les institutions démocratiques afin de promouvoir la responsabilité et la transparence. Ces mesures, prises collectivement, visent à traiter les causes profondes des troubles, à prévenir la répression inutile et à favoriser un environnement où les manifestations pacifiques sont respectées et les droits de l’homme protégés,’ ajouta Alfred Nkuru Bulakali
Le gouvernement a le devoir de protéger ces droits pour tous les citoyens.Nous exhortons donc vivement le gouvernement guinéen à favoriser un environnement propice à la tenue de manifestations pacifiques, sans ingérence inutile, tout en assurant une sécurité adéquate aux participants. L’utilisation d’une force excessive ou disproportionnée contre les manifestants est totalement inacceptable et doit être résolue de manière urgente.
Conformément aux traités internationaux relatifs aux droits de l’homme, tels que le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) et la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP), la Guinée a l’obligation de respecter, de protéger et de garantir ces droits. De plus, la Constitution guinéenne consacre des droits fondamentaux, tels que la liberté d’expression et la liberté de réunion pacifique.
Afin d’instaurer un changement durable, il est impératif que le gouvernement guinéen mette en place des mécanismes efficaces pour assurer la protection des manifestants et de leurs droits. Cela comprend la réalisation d’enquêtes approfondies sur les actes de violence et les violations des droits de l’homme survenus lors des manifestations, la poursuite impartiale des responsables, ainsi que la mise en œuvre de mesures de réparation appropriées pour les victimes.
ARTICLE 19 enjoint le gouvernement guinéen à accorder une priorité absolue au dialogue et à la résolution pacifique des griefs exprimés. Un engagement constructif avec toutes les parties prenantes, y compris les Forces vives de Guinée, est essentiel pour aborder les préoccupations et établir une plateforme de discussions ouvertes. La protection du droit d’exprimer des préoccupations et des revendications légitimes, sans crainte de représailles, est un pilier essentiel d’une société démocratique.
De plus, nous encourageons instamment le Rapporteur spécial de l’Union africaine (UA) sur la liberté de réunion et d’association à entreprendre sans délai une enquête approfondie sur le schéma récurrent de répressions sanglantes, d’utilisation de la force meurtrière et d’impunité en Guinée. Il est primordial de plaider en faveur de réformes politiques et juridiques globales, de fournir des formations et de renforcer les capacités des forces de sécurité, de garantir la transparence et la responsabilité, de favoriser le dialogue et l’engagement, de soutenir la société civile; ainsi que de renforcer la coopération avec les mécanismes régionaux et internationaux des droits de l’homme. Ces actions sont nécessaires pour faire face à ces graves violations, défendre le droit à la réunion pacifique et à l’association, et mettre en place des mesures efficaces visant à prévenir de telles violences à l’avenir.
Pour de plus amples informations, veuillez contacter :
Maateuw Mbaye, Assistant de programme, ARTICLE 19 Sénégal/Afrique de l’Ouest Email : [email protected] Tél. : +221 785958337
Aissata Diallo Dieng, Responsable de bureau, ARTICLE 19 Sénégal/Afrique de l’Ouest Email : [email protected]Tél. : +221 338690322