Dans son rapport intitulé « Pour un nouveau partenariat mondial », le Groupe de personnalités de haut niveau a affirmé que les droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion et le droit d’accès à l’information sont essentiels pour le développement durable. Ces droits sont les éléments constitutifs fondamentaux de la bonne gouvernance qui donnent à chacun les moyens de participer activement à la réalisation des objectifs du développement. Cette note émet des recommandations sur la manière d’y parvenir en fixant des cibles claires et mesurables à partir des recommandations du Groupe de personnalités de haut niveau.
Le droit à l’information
La transparence et la libre circulation de l’information sont largement reconnues comme fondamentales à la promotion des droits liés au développement. Le Groupe de personnalités de haut niveau a affirmé : « Transparence et responsabilisation aident les institutions à travailler correctement et garantissent que ceux qui détiennent le pouvoir ne puissent pas utiliser leur position à leur avantage ou à celui de leurs amis. La bonne gouvernance et la lutte contre la corruption sont des questions universelles. Partout, les institutions pourraient se montrer plus équitables et plus responsables. La transparence est essentielle. Elle permet de vérifier que les ressources ne sont pas gaspillées, mais qu’elles sont au contraire gérées et utilisées au mieux. » À cet effet, le Groupe de personnalités a préconisé une « nouvelle révolution des données » en vue de renforcer la collecte d’informations pour atteindre les objectifs du développement.
Pour y parvenir, chaque pays doit adopter un cadre juridique efficace garantissant la collecte et la diffusion de l’information. La cible doit assurer que les individus, les organisations de la société civile, les entreprises, et d’autres entités formelles et informelles ont un droit, prévu par la loi, d’accès à l’information détenue par les organismes gouvernementaux ainsi que par d’autres institutions adaptées à leurs besoins. Ceci suppose au minimum que les pays adoptent et mettent en œuvre un cadre juridique du droit à l’information qui énonce des normes minimales relatives au droit de chacun d’exiger de l’information, au devoir des organismes de recueillir, conserver et fournir des informations dans un format utilisable et sans restrictions, et qui prévoie un ensemble d’exemptions spécifiques limitées ainsi que des mécanismes d’appel, un contrôle et des sanctions. Plus de 100 pays –parmi lesquels figurent la Chine, l’Inde, l’Indonésie, le Nigéria, le Mexique et le Brésil – ont d’ores et déjà adopté des lois et règlements nationaux en se fondant sur ces normes. L’accès à l’information peut être renforcé par la publication anticipée d’information dans certains domaines par le biais des technologies de l’information et des communications ainsi que par une législation sectorielle spécifique dans des secteurs clés. En l’absence de ce cadre juridique, rien ne garantit que des informations précises et utiles seront recueillies et mises à la disposition de ceux qui en ont le plus besoin.
La liberté d’expression
L’équipe spéciale du système des Nations unies a indiqué dans son rapport au Secrétaire général : « Le pluralisme et l’indépendance des médias pourront aider à sensibiliser davantage le public aux questions de développement, à doter les gens d’informations et donc du pouvoir de mieux suivre la mise en œuvre et les performances et d’exiger des comptes des gouvernements ».
Les médias – entités formelles et informelles et individus – rencontrent dans de nombreux pays des obstacles pour enquêter sur des questions liées au développement et en rendre compte. Ils n’ont souvent pas accès à des informations importantes et sont la cible de menaces légales et extrajudiciaires, tout particulièrement lorsqu’ils révèlent la corruption de fonds publics, le détournement de fonds tirés des ressources naturelles, l’évasion fiscale pratiquée par des entreprises et des individus puissants, entre autres questions ayant un impact sur le développement économique d’un pays.
Les cibles doivent promouvoir la liberté d’expression et éliminer l’impunité dont bénéficient les auteurs d’attaques contre les médias. L’UNESCO a déjà élaboré des « indicateurs de développement des médias » de haut niveau qui mesurent la liberté des médias dans différents pays sur un grand nombre de questions. Qui plus est, l’ouverture d’enquêtes approfondies débouchant sur des poursuites contre les responsables de toutes les attaques avec pour cible un niveau strict d’impunité zéro doit être intégrée dans l’objectif probable de sécurité.
Promouvoir l’espace public
Le rapport du Groupe de personnalités de haut niveau fait observer : « La société civile doit jouer un rôle central, significatif, ce qui exige qu’on prévoie un espace pour les personnes souhaitant participer à la vie politique et à la prise de décision ». Le rôle de la société civile dans la promotion du développement est fermement établi depuis près de 30 ans dans la politique internationale – du rapport de la Commission Bruntland jusqu’à la Déclaration de Rio en 1992, la Déclaration du Millénaire, Agenda 21, et dernièrement dans la Déclaration de Rio + 20 « L’avenir que nous voulons ».
Malgré cette reconnaissance, des lois et des politiques restrictives prolifèrent dans le monde entier pour restreindre les libertés fondamentales d’expression, d’association et de réunion de la société civile qui sont énoncées par le droit international et nécessaires au bon fonctionnement des organisations de la société civile.
Celles qui agissent dans de nombreux secteurs – tout particulièrement celles qui contestent le statu quo en préconisant un environnement sain, qui luttent contre la corruption ou donnent une impulsion à d’autres besoins importants liés au développement – risquent d’être l’objet d’une fermeture arbitraire ou d’autres sanctions sévères ainsi que d’ingérence indue des autorités et de harcèlement. Dans bien des pays les lois et les politiques menées exigent de plus en plus des organisations de la société civile qu’elles « harmonisent » leurs activités avec les priorités gouvernementales dans des plans nationaux de développement. Ces exigences limitent souvent la capacité des organisations de la société civile de mener des activités qui pourraient bénéficier à des communautés marginalisées ou de se concentrer sur des questions négligées par les gouvernements.
Ces efforts sont contreproductifs. Ils doivent être remplacés par une cible d’ouverture de l’espace public en vue de garantir que les idées et actions les meilleures et les plus créatrices sont favorisées pour déployer les efforts considérables nécessaires pour parvenir à un développement durable.
RECOMMANDATIONS DU GROUPE D’EXPERTS DE HAUT NIVEAU | CIBLES | Indicateurs possibles |
« Garantir le droit du public à l’information et l’accès aux données officielles » | Un cadre législatif global garantissant l’accès du public aux informations officielles Une législation sectorielle garantissant l’accès du public à des domaines spécifiques particulièrement importants pour le développement durable | Adoption et mise en oeuvre d’une loi sur le droit à l’information conforme aux normes internationales Sectoriel · Mise en œuvre des Directives du PNUE pour le développement de la législation nationale sur l’accès à l’information, la participation du public dans la prise de décision et l’accès à la justice dans les questions environnementales (Directives de Bali) · Adhésion à l’Initiative de transparence dans les industries extractives (ITIE) · Adhésion à l’Initiative internationale pour la transparence de l’aide (IATI) · Transparence budgétaire et fiscale · Politique d’accès libre aux données |
« Garantir le droit à la liberté d’expression, à la liberté d’association et à la liberté de réunion pacifique ainsi que l’accès à des informations et des médias indépendants » | Un cadre juridique garantissant la liberté des médias et le droit du public à la liberté d’expression | · Indicateurs de développement des médias (UNESCO) · Élimination de l’impunité et des atteintes aux droits fondamentaux des journalistes |
« Augmenter la participation des citoyens à la vie politique et renforcer l’engagement civique à tous les niveaux » | Garantir à la société civile un environnement juridique et règlementaire qui reconnaisse l’indépendance des citoyens et leur droit de mener leurs activités pacifiques sans crainte de harcèlement, de représailles, d’intimidation et de discrimination Adopter des mécanismes inclusifs garantissant une participation entière et efficace du public aux plans et politiques liés au développement et à l’environnement | · Indicateur de l’environnement favorable (CIVICUS) · Stratégie interaméricaine pour la promotion de la participation du public à la prise de décision pour le développement durable · Principes directeurs de l’OCDE et du PNUE sur les évaluations d’impact environnemental et les processus d’évaluation stratégique environnementale |